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Intention

Toujours déterminés dans notre démarche de sensibilisation, nous faisons de cette exposition un pari : démocratiser l’accès à l’art et à la céramique contemporaine au plus grand nombre.


D’une part, il s’agit de faire venir un public de plus en plus averti. Il s’agit de notre public fidèle, qui suit nos propositions artistiques d’années en années. Il est principalement composé d’une population locale, familière aux expositions accueillies par la galerie Joseph Ravaisou mais aussi d’amateurs d’art et de céramique contemporaine.


D’autre part, il s’agit de toucher de nouveaux publics afin de faire rayonner la céramique contemporaine auprès du plus grand nombre. Comment ?

  • Les visites guidées pour tous sont un 1er vecteur. C’est d’ailleurs une grande nouveauté pour cette édition et nous proposons aux publics 5 créneaux de visites guidées. Amateurs ou experts, elles sont adaptées à tous, sans restriction d’âge ni de niveau d’expertise en céramique ! Tout le monde est invité à découvrir l’univers fascinant des artistes sélectionnés et leur processus créatif.
  • Le dispositif de visite virtuelle en est un second, rendant la visite de l’exposition accessible à tous, partout dans le monde. Ce dispositif connaît d’ailleurs un franc succès depuis 2 ans !

La galerie Joseph Ravaisou devient donc, dans sa version réelle ou virtuelle, ce lieu accessible à tous où le travail transcendant des artistes sélectionnés, éveillera forcement les sens de ses visiteurs.

Quelques mots sur l’exposition « Terres d’expression »

Du 8 au 23 avril 2023, l’association du Printemps des Potiers ainsi que le service culturel de la ville de Bandol présente, à la galerie Joseph Ravaisou, une exposition consacrée à la sculpture céramique actuelle. L’exposition explore à travers plus de 100 œuvres, différentes expressions émanant de la matière.

Venant de différents territoires (français et européen) six céramistes nous invitent à s’interroger sur notre propre rapport au vivant. Aujourd’hui plus que jamais, ce médium millénaire inspire et questionne notre relation au monde actuel et notre place dans l’univers. De grands noms de la céramique contemporaine tels Gisèle Buthod-Garçon, Marit Kathriner ou Joan Serra sont présents avec leurs réalisations impressionnantes faites à partir de ce matériau singulier qu’est l’argile.

Simultanément, une exposition carte blanche est offerte à la céramiste Nanouk Anne Pham, aujourd’hui amplement reconnue pour ses décors au bleu de cuivre. Conçue comme une véritable exploration immersive dans l’univers de l’artiste, cette rétrospective, fusionnant céramique et photographie, s’articule autour de ses différentes périodes de création.

Installée en 1977, Nanouk Anne Pham compose de ses mains des formes utilitaires de grès avec, parfois, l’ajout de porcelaine. Décorées d’émaux mats où la gamme des bleus de cuivre se réchauffe de touches chaudes et de graphismes, ses œuvres nous invitent à plonger dans ce monde onirique. L’exposition réunit une quarantaine de ses créations céramiques qui dialoguent avec une sélection d’images réalisées par le photographe Anthony Girardi.  Une évocation de sa gestuelle et de son atelier à Collorgues complètent l’ensemble des tirages photographiques dédiés aux pièces in situ.

Présentation par Frédéric Bodet

Conservateur, anciennement chargé des collections au Musée de Sèvres de Paris.

Dans une approche contemporaine, le travail plastique de la terre développe des recherches formelles liées aux spécificités du matériau : souplesse, ductilité, sensualité, densité. La céramique est un art du processus, c’est-à-dire une démarche motivée qui engendre des gestes, des pratiques, des techniques générant des formes. Le temps est une donnée essentielle dans l’élaboration de ces formes, et le céramiste travaille toujours avec le temps : celui du travail de l’argile selon diverses approches techniques… Puis vient le temps parfois long du séchage et enfin celui des aléas de la conduite de la cuisson. Loin d’être un geste spontané, l’élaboration d’une œuvre en céramique est dépendante d’un ensemble considérable de décisions, de méditations et de rituels qui visent à explorer le matériau pour ses potentialités propres, afin d’en dégager une expression singulière, d’une lente maturation, à l’échelle d’une vie. Les artistes invité-e-s dans cette exposition dialoguent intrinsèquement avec l’argile originelle, observant la nature, s’émerveillant devant des phénomènes physiques, à l’affût des réactions de leur matière de prédilection.

Se considérant comme un « ramasseur d’image et de sensations », Philippe Godderidge (né en 1955), tout à la fois artiste-potier, sculpteur et cultivateur, exprime fort bien ce qui pour lui, comme pour tous les autres, a constitué « un choix de vie ». Sa pratique quotidienne de l’écriture constitue un manifeste de la relation indéfectible au sol qu’il cultive, dans le Calvados : « Nous vivons sur le matériau que nous travaillons. Cette conscience-là appartient aux céramistes, à toutes les potières et aux potiers du monde entier, et nous confère un langage commun. Il n’est d’autre question que celle du sens de nos vies ».

Empruntant d’autres chemins formels que Philippe Godderidge, la jeune céramiste Zélie Rouby (née en 1986), installée dans la Drôme, travaille pourtant également avec le vivant : elle cherche à donner une vie organique, une « peau habitée » et vivement colorée à la nature minérale du grès qu’elle utilise, en le modelant au colombin pour obtenir des formes amples et d’une douceur étrange, qui semblent respirer.

Le céramiste catalan Joan Serra (né en 1962) s’intéresse quant à lui moins à la forme en elle-même qu’aux conditions de son apparition, à la magie de sa « transformation ». Ses structures de base sont toujours pratiquement identiques, des polyèdres réguliers mais d’une densité de masse d’argile différente et qui vont évoluer – autant dire se désagréger – par l’addition de matériaux combustibles qui disparaîtront durant la cuisson. Un art des limites de la matière poussé à l’extrême : le processus va engendrer un chaos dans l’organisation initiale de ces volumes : « Un avant et un après sans retour, ceci est le défi du processus céramique. (…) Aux limites, il y a ce qui m’intéresse », commente-il.

La contemplation du minéral est ce qui passionne le plus la céramiste Gisèle Buthod-Garçon (née en 1954), installée dans le Gard, à Saint-Quentin-la-Poterie. L’artiste est fascinée par les « pierres de rêve », source de méditation des lettrés chinois ou japonais, tout comme elle est influencée par les paysages rocheux qui l’entourent. Elle cherche dans ses sculptures à traduire leur lente érosion, questionnant le passage du temps, tentant de capturer l’origine d’une forme minérale naturelle, sa poésie aléatoire et métamorphique.

Réconcilier l’homme et le vivant semble être la principale préoccupation de la céramiste Marit Kathriner (née en 1980), d’origine suisse, qui s’est établie à la campagne près de Châteauroux. Ses sculptures expriment toujours un élan vital, l’intuition d’un geste ou l’amorce d’une chorégraphie qui puisse confondre le corps humain et le règne végétal. Dans ses sculptures, tout parle de manière symbiotique de la force sauvage de corps-lianes, de fragilités, d’énergies et de croissances.

Plus monolithiques, les blocs sculptés de Brigitte Marionneau (née en 1958), établie en Loire Atlantique, dans le pays breton de Guérande, conservent pour autant un fort rapport au paysage et à la topographie du territoire. « Encrés dans les ténèbres du carbone » d’un noir seulement animé par la matière lisse ou texturée, les volumes austères de ses sculptures enferment un vide, tels des paysages abstraits qui se replieraient sur eux-mêmes pour « contenir le vent »…

Enfin, un hommage particulier est fait dans cette exposition à la potière Nanouk Anne Pham (née en 1937), installée à Collorgues dans le Gard, qui reste très attachée à la notion de contenant, revendiqué par elle-même comme un véritable espace d’expérimentation artistique. L’artiste cherche essentiellement à retranscrire la fluidité du ciel et de la mer dans la nature minérale d’un grès très chamotté, modelé et adouci dans ses formes pour le faire devenir très « humain » et sensuel. Elle privilégie dans ses couvertes d’émaux les riches variations de bleus de cuivre, cuits à hautes températures, en réduction.

Au cœur de cette exposition, matérialité et imaginaire sont ainsi constamment mis en relation dans une pratique au long cours de la terre, ce qui donne à ces 7 artistes une conscience du monde très personnelle : leur intérêt pour la nature des sols, le monde végétal et minéral et même le cosmos leur permet de ressentir de façon aiguë le mouvement constant de l’univers. Ils et elles ont choisi de vivre un rapport singulier au temps et à l’espace qui les environne, terreau et ferment de leurs expressivités singulières et de leurs parcours artistiques exigeants.

Bonne visite à tous !

L’équipe du Printemps des Potiers